Lettre d'informations printanières 2024
en direct des vergers....

15 avril 2024 entre Mula et Pliego… Bruits de sécateurs, d'oiseaux (la huppe cendrée par exemple), d'abeilles, et de débroussailleuses ! Odeur délicieuse de fleurs de citronniers et d’orangers, chaleur inhabituelle en ce mois d’avril…  


Ce lundi matin, c’est le moment de récolter les oranges Valencia Late et les citrons Verna, pour nos collègues de l’autre côté des Pyrénées : Juanito, Maria, Jesús. 

Maria

Sur les orangers, en l’occurrence les Valencia Late que vous dégustez depuis début ou mi-avril, il y a les fruits prêts à être récoltés et les fleurs qui deviennent de petits fruits (transition appelée « cuaje » en espagnol, ce moment est super important et délicat pendant lequel il faut nourrir les arbres, leur procurer de la force) qui donneront les oranges du printemps prochain. C’est typique des agrumes, deux saisons en même temps sur l’arbre. Magique !

Avril : il faut passer le girobroyeur dans les rangs, sous les arbres (orangers, citronniers, clémentiniers). C’est José, autre de nos collègues, qui s’en charge, image à l’appui (voir la galerie ci-dessous) sur les parcelles de la Casa Talega. Parmi les plantes sous les arbres : plusieurs Astéracées, des Poacées, de l'Oxalis, du Liseron…

Que se passe-t-il d’autre ici en ce moment printanier ?

Carlets me signale que ses oliviers sont en fleurs, et que chez lui il y a quelques semaines, deux Français du réseau BioEspuña sont venus récolter de la fleur d’orangers pour la distiller (patience...nous en dirons plus ultérieurement). Thématique florale donc ! 

Sur ses parcelles à El Niño de Mula, José est ravi et tout sourire -bien que fatigué par la charge de travail du moment- de montrer ses orangers sanguins qui se portent bien, ses clémentiniers récemment plantés qui grandissent à merveille... Quant aux pomelos (en fleurs avec formation des petits fruits de la saison prochaine), certains arbres peinent plus que d'autres mais globalement ça va. 

La Casella qui regroupe plusieurs paysans à Alzira dans la région de Valencia, va mieux après une grosse crise interne. Les paysans de ce collectif -que nous connaissons depuis plusieurs années- se sont restructurés, notamment à travers une équipe salariée plus solide. Même si certains parmi vous ont le cas des derniers avocats en tête, la qualité des fruits de ces paysans est globalement bien meilleure qu'avant. A encourager ! Nous avons des relations intéressantes avec eux, basées sur l’entraide (commercialisation, agronomie) et nous souhaitons les garder.

Nous vous parlions il y a quelques temps d'une grosse production cette saison à travers un jeu de la caisse de citrons mystère... Mais pourquoi une telle production de citrons en ce moment ? L'hypothèse de Cristóbal : en 2023, il a plu en mai/juin. À ce moment-là de la saison, du cycle végétatif du citronnier, l'arbre a de tous petits fruits prêts à être récoltés un an après. 

Comme il y en a beaucoup, l’arbre sélectionne ceux qui seront bons et élimine les non-viables, un système d’éclaircissement naturel en quelque sorte. Sauf qu’en mai 2023, il y a eu de la pluie juste à ce moment-là. Et la pluie a conduit l’arbre à capter l’azote de l’atmosphère. L’arbre, croyant à une abondance nitrique s’est dit "OK c’est bon, je garde tous mes fruits, ils auront à manger !" Donc surproduction en 2024. À tel point que tout n’est pas récolté dans le sud est de l'Espagne, il y a des tonnes de citrons parterre…

Et l’eau vous allez me dire ??!!  Oui, il fait sec... toutes et tous attendent la pluie qui n'est pas tombée de manière significative depuis mai 2023...  L'occasion de vous expliquer certaines choses concernant l'irrigation. Plusieurs des paysans de BioEspuña produisent des agrumes et d’autres fruits dans le secteur de Mula, où l’irrigation est gérée par une association au sein de laquelle sont représentés les paysans (l'équivalent de nos syndicats mixtes en France). La zone d'irrigation est calibrée sur la ressource qui provient de la montagne à proximité et stockée dans la retenue collinaire de la Cierva (capacité 7hm3 d’eau). 

A savoir que cette zone irrigable concerne 2000 hectares sur une surface municipale de 63 0000 hectares et représente seulement 7% de la Surface Agricole Utile (SAU). Elle correspond qui plus est aux parcelles fertiles bénéficiant d’un micro-climat doux (sans gel).  Le débit minimal de la rivière est donné par le ministère de l’écologie, permettant de distribuer les droits d’eau aux propriétaires et exploitants, et de définir le périmètre irrigable. A savoir que les parcelles concernées sont de petite taille, héritage de la « Huerta » traditionnelle (ceinture arboricole et maraîchère)  avec encore à certains endroits l’ancien système d’irrigation hérité de l’époque arabe : un maillage de canaux pour irriguer par inondation. Ce système a peu à peu été remplacé une irrigation localisée au goutte-à-goutte, plus économe en eau.


S’il n’y a actuellement pas de problème d’eau dans cette zone de Mula (voir carte ci-dessus) du fait de la bonne gestion de l’association d'irrigation -la surface irrigable n’augmente pas et les droits d’eau sont contrôlés-, l’attente de la pluie n’en est pas moins palpable et anxiogène. « La pluie apporte bien plus de choses intéressantes pour l’arbre que l’eau d’irrigation », m'explique José, dont vous avez dégusté les pamplemousses et les oranges sanguines cette saison. 

Et c'est autrement plus critique pour les cultures sèches, c'est-à-dire non irriguées : dans le verger d'amandiers de Marí Carmen et Cristóbal, les fruits sont formés et le feuillage est là, ce qui paraît incroyable étant donné le contexte de sécheresse. Seulement, les arbres vont devoir passer l'été avant la récolte d'août-septembre... Du côté des oliviers de Casa Pareja, Juan a partagé son optimisme quant à la fructification car son territoire (Jumilla) a bénéficié d’un peu de pluie au sortir de l’hiver (contrairement à d’autres endroits) permettant de prendre soin de la floraison et de réaliser une irrigation de soutien. Malgré le contexte difficile, il garde le sourire et nous espérons que les améliorations se poursuivent…

A savoir que les paysans qui produisent les fruits que vous mangez ont des pratiques visant à réduire la consommation d'eau : irrigation par goutte-à-goutte, couverts végétaux (ci-contre le verger de pamplemousses de José), diversification végétale pour jouer sur les besoins en eau qui varient selon les espèces, préservation de la vie des sols afin de rendre les arbres résilients à l'environnement sec.


La thématique de l'eau a d'ailleurs été le fil rouge de nos enquêtes sur les fermes lors de la semaine Système Participatif de Garantie (SPG) de février. Nous sommes en train de finaliser les synthèses de ce voyage (que vous aurez très bientôt !) une nouvelle fois riche en échanges producteurs-mangeurs, bien dosée entre une exigence de questionnements et une compréhension bienveillante vis-à-vis de paysans. Nous faisons une restitution du voyage de 2024 le mercredi 12 juin à la Ferme de Vernou, si vous êtes intéressés, merci de me contacter : julie@bioespuna.eu

J'espère avoir rendu compte au mieux d'actualités dans les fermes et des réalités de ces femmes et hommes qui s'efforcent de produire de la qualité tout composant avec les imprévus de la nature, les effets du changement climatique, les contraintes économiques...

Merci de continuer à nous soutenir !

Julie pour l'équipe

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